L’étoile des automobiles papales
Grand luxe au Saint-Siège
Comme tout haut dignitaire qui se respecte, le Très Saint Père a lui aussi droit à son véhicule d’apparat. Au fil du temps, besoins et ambitions évoluant, les fournisseurs du Vatican se sont succédés. Seul Mercedes semble détenir des faveurs éternelles…
En 1929, Mussolini, alors à la tête de l’Etat Italien, et le Cardinal Gaspari, Secrétaire d’Etat du Pape Pie XI, réduisent la souveraineté du Pape au seul Etat de la Cité du Vatican.
Mercedes-Benz, concevant que le Pape avait les coudées franches, inspira l’idée à Pie XI qu’il était peut-être temps de renvoyer son pontifical carrosse aux écuries, pour arborer une plus moderne automobile.
En faisant don à Sa Sainteté d’une Daimler Benz Nürburg 460 spécialement meublée, Mercedes s’assurait de récolter un prestigieux bénéfice de visibilité !
Cette généreuse offrande était le point de départ d’une présence intense de Mercedes sur la place Saint-Pierre de Rome, au pied du balcon du Palais de Castel Gandolfo.
Après 30 années de service, la Nürburg 460 construite spécialement pour Pie XI, une berline à l’élégance statutaire qu’il avait décrite comme un « chef d’œuvre de modernisme », était enfin remplacée. Ainsi, en 1960, le chauffeur de Jean XXIII s’installait au volant d’une Mercedes-Benz 300D Landaulet. Le trône accueillant l’auguste séant du Pontife avait été reconduit mais était alors situé sous un toit partiellement décapotable.
C’était le début des processions mêlant à la fois bain de soleil et bain de foule. Ce Landaulet, étiré de 45 centimètres, bénéficiait en outre d’un dispositif radio permettant au Pape de communiquer avec son chauffeur ainsi que de la climatisation. Il aurait été malvenu que le Pape, confiné dans son épaisse soutane ne voie la sueur perler sur son crâne dépouillé.
En 1965, après une anecdotique balade en Lincoln aux States, Mercedes offrait à Paul VI celle qui nous apparait la plus élégante, la plus exclusive, la plus moderne et la plus équilibrée des voitures d’apparat : la Mercedes-Benz 600 Pullman. Ses portes arrières gigantissimes, une capote sans fin et un pavillon rehaussé, plaçaient ce landaulet à la mesure de la dévotion des masses.
En 1966, Mercedes offrira une 300 SEL Landaulet, d’apparence plus ancienne, avant de revenir en 1967 à une 300 SEL à pavillon rehaussé mais rigide, capable d’accueillir jusqu’à six personnes à l’arrière.
En 1980, à l’occasion d’un voyage en Allemagne Mercedes pourvoit au Pontifex Maximus, une Mercedes Classe G230 à châssis court dont la partie arrière, rehaussée, était surmontée d’une cage de verre, plaçant le Pape dans un joli bocal cheminant au dessus des foules, tel le Christ sur les eaux.
En 1981, le « pauvre » Jean-Paul II, saluait la foule massée Place Saint-Pierre, juché sur la rudimentaire plateforme d’une Fiat Campagnola aussi laide que rustique, s’est trouvé bien vulnérable lorsqu’un détraqué lui mit deux balles dans la chair. Cet horrible véhicule qui, reconnaissons-le, n’avait pour intérêt qu’une blancheur digne de l’imma(tri)culée conception, fut récemment réutilisé par Benoît XVI, qui subît à son tour une tentative d’agression.
Entre 1981 et 1985, le Pape se fit Judas et trahît sa bavaroise bonne étoile en s’affichant dans d’étranges véhicules : Peugeot 504, Seat Marbella, Range Rover à bocal blindé, un monstrueux camion Leyland et un très roturier pickup GMC.
Mercedes Marquait son retour en force en 1995 avec une 500 SEL entièrement blindée, équipée d’un vaste toit ouvrant, d’une plateforme d’élévation et d’un petit pare-brise basculant, permettant au Pape d’éviter d’avoir des moustiques coincés dans le râtelier alors qu’il salue ses fidèles avec une grâce céleste
En 1997, Mercedes faisait son retour avec un Landaulet S500, équipé d’un toit en dur type « coupé-cabriolet » et d’un siège central s’élevant de 50 cm, permettant à sa Sainteté de saluer sans mutiler ses mules de velours.
En 2004 Mercedes reprenait le concept du "Papequarium" et l’appliquait à un ML430, avant de revenir à un G500 à châssis court dont la cage de verre se muait, en devenant amovible, en cloche à fromage.
L’histoire de la Papamobile peut être racontée en deux phases. L’une témoigne d’une époque où le Très Saint Père faisait le choix de se déplacer dans un véhicule, élégant, richement équipé et abondement personnalisé. C’est l’époque des belles et vastes Mercedes arborant chromes et classieux noir piano. Puis au détour des années 80, les voitures d’apparat papales font le testament de la diversité, du blanc immaculé, symbole de pureté.
Depuis lors les Papes vivent comme des poissons dans l’eau d’un bocal climatisé à roulettes. Quand ils se risquent à en sortir, la foule insensée tente de les faire suffoquer. Paieraient-ils le prix de prises de positions arriérées, ou celui des agissements dévoyés de membres du Clergé ?
Toujours est-il que Mercedes est en odeur de sainteté dans tous les prieurés. Le dernier Classe G, entouré de la phalange militaire rapprochée du Pape offre à la Cène une prestance que l’assistance ne pourra oublier.
Julien Libioul
V12 GT
L'émotion Automobile
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