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Présentée en 1934, la Bugatti Type 57 reçoit le fameux moteur huit cylindres en ligne 3257 ccm, double arbres à cames en tête, un châssis aux petits oignons et bientôt des freins hydrauliques. La clientèle la plus féroce pouvait faire l’acquisition du Type 57S à châssis rabaissé, dont le moteur pouvait être agrémenté d’un compresseur. Ainsi équipée, un « Tank » fuselé pour la compétition emporta le Grand Prix de France 1936 et le Mans en 1937 et 1939. Incroyablement sophistiquée pour l’époque, ce Type 57 ne manquera pas de séduire une clientèle exigeante.

Commandé en décembre 1938 à Paris par le Capitaine Gerand Ankerman, le châssis de ce Type 57C atterrit dans les ateliers Letourneur et Marchand en février de l’année suivante. Jean-Arthur Marchand et Jacques Letourneur, se sont rencontrés au tournant du vingtième siècle. Sous les ordres du carrossier Binder, ils apprennent peu à peu l’art de tracer la tôle, de dessiner des formes et d’habiller un châssis pour le transformer en automobile. Arrivés à maturité technique, les deux hommes quittent leur employeur et lancent leur propre officine. Après avoir conçu plus de 1500 carrosseries pour des clients privés, lassé des exigences qu’imposent le travail à l’unité, Letourneur et Marchand se lancent dans la sous-traitance en série avec pour premier client la réputée société Delage !

Livrée en avril au Capitaine Ankerman, ce Type 57C lui servit jusqu’au début de la seconde guerre mondiale. Réfugié à Londres, Ankerman avait laissé son joujou à Paris, où il était utilisé par le Commandant Yvonne McDonald durant les hostilités. En juin 1940, McDonald descend à Bordeaux avec la 57C, rejoint les nouvelles installations de Bugatti, dans le but de l’y cacher et de la préserver des mains des Allemands.

En 1945, la Bugatti est retrouvée dans les environs de Paris avec pour mention sur les portes « Mission Interalliée ». Jamais une voiture n’aura mieux porté le nom de machine de guerre ! Ce Drophead Coupe a donc du servir, à un haut gradé des forces alliées peut-être, nécessitant de se déplacer rapidement, de filer entre les bombes, de se défaire du feu des ennemis. On imagine les 160 chevaux de ce bolide filer à tombeau ouvert, le compresseur s’affoler pour emmener ses phares anémiques vers l’horizon, au travers de villages dévastés par les hostilités, pour transmettre un ordre de mission capital.

Vestige de la grande tradition des carrossiers Français, trace éternelle de leur talent, incarnation de la main de deux hommes, cette Bugatti, issue du génie d’Ettore et de son fils Jean Bugatti, affirme le brio automobile d’une nation. Ses formes inimitables, son élégance racée et son profil exclusif sont auréolés de la dimension historique, voire héroïque de ceux qui ont permis de refermer ce tristement belliqueux chapitre de l’histoire mondiale.

Vous voulez entrer dans la peau du Commandant McDonald ? Prenez un billet pour l’Arizona, RM Auctions se fera une joie de vous vendre cette Bugatti, ou l’un des nombreux autres lots de leur première vente annuelle.

Julien Libioul

V12 GT

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