En 1966, Lamborghini lance sur la planète GT sa Miura. Une automobile outrancière et révolutionnaire qui annonce avec fracas changements de mentalité, révolutions sexuelles et bouillonnements esthétiques. Papiers d'époque.
En 1960, la marque Lamborghini est encore jeune.
Son créateur, Ferrucio Lamborghini, ingénieur de talent fait fortune dans la construction de tracteurs agricoles.
Propriétaire d’une Ferrari, frustré par des soucis d’embrayage, il se rend chez le Commendatore, Enzo Ferrari, qui refuse de recevoir un « marchand de tracteurs ».
Profondément vexé, Ferrucio estime qu’il n’y a rien chez Ferrari qu’il ne puisse réaliser avec plus de réussite. S’en suivent la naissance de véhicules superbes, puissants et aboutis tels les 350 et 400 GT.
En secret, les trois principaux ingénieurs de la marque travaillent sur un projet ambitieux : construire une GT avec des techniques directement issues de la compétition. Dénommé P400, il fut ébauché à la faveur d’inspirations nocturnes et finit par convaincre un Ferrucio retissant face aux coûts de production.
Or, la décennie 1960 est une époque étrange, glorieuse des succès économiques d’après-guerre mais verrouillé par des mentalités qui peinent à s’adapter à l’évolution des nations, de la planète. Cette époque est celle du Bloc de l’Est, de la guerre du Viêt Nam et de Kennedy. Mais ce passé fait bientôt face à des mouvances naissantes ou en phase d’affirmation, celles du Pop Art et de la Nouvelle Vague. Les 60’s sont ceux de Warhol, de Mai 68, des Rolling Stones, des Doors et de Woodstock. Dans le design comme dans la mode, apparaissent les matériaux synthétiques, le plastique, les couleurs vives et contrastées.
Née en 1966, baignant dans ce contexte, la Lamborghini Miura va catalyser ces révolutions en gestation, se les approprier et proposer une image décalée, en avance sur son temps, parfaite illustration, dès 1966, des années 70.
Les concurrentes de la Miura seront les Maserati Ghibli et Ferrari 275, superbes véhicules certes, mais d’une conception traditionnelle. Une 275 GTB/4 fera d’ailleurs la joie d’Yves Montand.
Avec la Miura, c’en est fini de la GT de papy Montand, des moteurs avant, des essieux rigides, des châssis séparés et des teintes élégantes. Au revoir ornementations de chrome, bonjour noir mat. Fini l’immense capot avant et les mécaniques en ligne. Moteur et boîte s’installent désormais à l’arrière et en travers.
Le talent de Bertone, signataire du profil pur et suggestif de la Miura, évoquant compétition et aérodynamisme, bouleverse les petrolheads de l’époque. Visage étrange et agressif, postérieur musclé. L’habitacle repousse le bois, s’orne de cuir et multiplie les manomètres. Tracé à la serpe, moderne et presque futuriste, il évoque la vitesse et manifeste avec drame les ambitions de la bête.
Sous cette sculpturale peau se cache un châssis hyper-rigide, savamment dessiné reléguant monocoques et autres châssis poutre au rang de vieilleries. A titre d’illustration, la carrosserie, pourtant essentielle aux méthodes de construction conventionnelles, n’apporte aucun bénéfice de rigidité au squelette de tôle de la Miura.
Dans cette nouvelle chronique, nous vous donnons l’occasion de vous replonger dans le passé via des documents rares et exceptionnels. Saisissez la patine de ces photos, appréciez l’époque où il n’était pas encore criminel de faire valoir les performances d’un bolide.
Et puis parcourez l’essai de Sport Auto. Il vous rappellera qu’à l’époque, une Miura était « facile » à conduire. Difficile à croire quand vos qualités de pilotes sont constamment refreinées, handicapées par de débilitantes aides à la conduite ! Examinez cette Miura en rouge, en jaune, en bleu. Contemplez catalogue, essais et publicités. Soyez béat, comme si c’était la première fois. Lisez et voyez dans ces vieux papiers numérisés l’occasion de vivre en 2011 l’Emotion Automobile de 1966.
Julien Libioul
V12 GT
L'émotion Automobile
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