Vingt ! Porsche n’en a produit que vingt ! Lorsque de si petites séries voient le jour, l’histoire transforme chaque exemplaire en une pièce unique. La Porsche que vous avez sous les yeux en est un criant exemple. Elle est la deuxième 911 2.0 R à avoir été mise en production, mais probablement la première à avoir été achevée. En 1967, le six novembre, à sa sortie des ateliers de Zuffenhausen, elle arborait déjà cette couleur « Light Ivory », apparue au catalogue Porsche quelques temps plus tard.
Quelques jours avant la sortie de cette 911 R, Porsche apprend que la 906 envoyée à Monza pour enregistrer un record du monde tombe en panne. Les règles sont strictes, Porsche a 48 heures pour réitérer sa tentative. Une Porsche doit donc être au départ le 31 octobre à 22 heures. Le département compétition décide alors d’y envoyer les deux premiers exemplaires de sa 911 R, alors en test dans la région de Stuttgart. Les deux bolides partiront par la route, filant de Stuttgart à Monza pour arriver à temps. La 911 R de notre essai, destinée à servir de mulet, ou de banque de pièces, ouvrait la route à l’autre bolide.
Quelques semaines plus tard, Porsche organise une présentation à la presse de son dernier bijou, la 911 R, dans l’enceinte du circuit d’Hockenheim. C’est le flamboyant Vic Elford qui la menait à la cravache, secouant allègrement le Gotha de la presse automobile.
La 911 R fut ensuite immatriculée, testée, engagée en compétition durant les mois qui suivirent, jusqu’à 1969, lorsqu’un certain Docteur Mario Daoli, résidant en Ethiopie, en fasse l’acquisition sans sièges ni ensemble moteur-boîte. Rapidement complétée, Daoli en fit un usage touristique et l’engagea à quelques reprises dans des courses locales. En 1980, à l’issue de sa carrière, Daoli rejoint les terres de ses origines, l’Italie, avant de vendre sa Porsche à un collectionneur Japonais. La voiture fit ensuite partie d’un lot vendu à la Symbolic Motor Car Company en Californie.
Jamais restaurée cette 911 R fait la fierté de son actuel propriétaire. Soucieux de l’originalité de ce monument de l’histoire sportive de la marque, il a tenu à rendre à cette fringante grand-mère la forme de sa jeunesse, sans pour autant sacrifier à l’authenticité de ce beau jouet. Ainsi, toutes les pièces remplacées, sont d’époque ou en ont l’apparence. Seul sacrifice, le carter en magnésium a été démonté et baigne aujourd’hui dans une barrique pleine d’huile pour le préserver de l’humidité. Un carter en aluminium lui a été substitué et le moteur a été remonté, conservant ainsi l’aspect visuel de ses origines.