Ce n’est pas sans émotion que je découvre cette SM. Après tout, qui peut se vanter d’être monté à bord, et surtout d’en avoir pris le volant ? Sa longueur est telle (5,60 m) qu’elle dépasse largement du garage qui l’abrite.
Son propriétaire s’installe au volant et lance le démarreur. Le V6 Maserati s’ébroue avec un râle et chauffe tranquillement. Citroën oblige, la pression monte dans le circuit hydraulique, et notre SM se lève avec majesté, donnant l’impression d’un (gros) chat qui s’étire tranquillement après une bonne nuit de sommeil.
Après avoir défait les trois crochets chromés au niveau de la baie de pare-brise, nous décapotons. Le système fonctionne parfaitement, toute l’armature de capote se soulève et vient se ranger doucement dans son logement derrière la banquette arrière.
Quelques minutes après, je suis au volant ! Nous traversons un quartier chic à faible vitesse. La position de conduite est agréable malgré le siège décalé à gauche, cela me fait penser aux premières Range Rover. Les vitesses passent sans problème, même à froid, je me méfie juste un peu des freins sur-assistés et de la direction « Diravi », très directe.
A faible vitesse, le confort est étonnant, bien supérieur à n’importe quelle voiture de luxe actuelle. Cela s’explique facilement : les sièges sont très bien dessinés et pas trop fermes, la suspension Citroën est magique et les pneus sont à profil haut, non pas ces ridicules taille basse qui rendent inconfortables toutes les voitures de prestige actuelles.
J’augmente la cadence, le moteur Maserati se réveille et émet des grondements très italiens, un peu incongrus dans une telle automobile. Nous roulons à vive allure, la suspension est toujours prévenante, tout en maintenant parfaitement la caisse, je m’habitue peu a peu à la direction, très précise, les remous d’air augmentent mais sont supportables.
Nous passons en trombe devant une voiture de Police ! Comment vont-ils réagir ? Ils font mine de nous saluer et se jettent sur leur radio pour appeler leur hiérarchie ! On imagine le conversation. Ils se demandent encore pourquoi ils n’ont pas été prévenus ! Il faut dire que notre SM exhibe fièrement toutes ses cocardes tricolores, ainsi que ses porte-fanions sur les ailes avant.
Un puis deux ronds-points. J’écrase le petit champignon faisant office de pédale de frein. Mon passager et moi décollons de notre siège, droit dans le pare-brise ! J’ai oublié que je suis au volant d’une SM. Tout comme la direction, une peu de doigté est nécessaire. Nous virons de bord, tout de passe bien. La caisse roule un peu, mais les suspensions ne se désunissent pas, et le châssis est d’une rigidité surprenante. Chapron savait ce qu’il faisait !
Je roule ainsi quelques temps, puis je passe à l'arrière, où je m'installe confortablement. Quel plaisir de pouvoir allonger les jambes de cette façon! Mon regard se promène sur la multitude de détails raffinés parsemés dans l'habitacle. Je me demande si je n’aurais pas pu embrasser une carrière dans la politique…Quelques goutes de pluie me réveillent, il faut recapoter, par peur de marquer la magnifique sellerie. Dommage, je serais bien allé parader sur les Champs Elysées…
Charles Paxson
V12 GT
L'émotion automobile
Photographe : Ghislain Balemboy